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Les voeux d un gourmet nonchalant


A table !

Tout en effet laissait présager une soirée peu ordinaire. Si les bouchons de champagne avaient ouvert les festivités, si les petits feuilletés étaient inhabituels et renversants, si les convives faisaient assaut d’élégance la jeunesse ayant accepté de remiser les jeans pour quelques heures et papy qui ne conservait qu’une vague idée des nœuds de cravate avait adopté un foulard à pois qui sentait la naphtaline, et si mamie avait un peu trop coloré les pommettes de son beau visage aggravées par deux coupes de champagne, c’est que décidemment dans la lueur des bougeoirs on bousculait usages et banalité. Mais on n’avait encore rien vu sauf les paquets cadeaux, anonymes sous le sapin, et qu’il faudrait attendre minuit – vous parlez d’une heure !- pour se bousculer, rire, déchirer, ouvrir et rire encore, les yeux étincelants.
A table !
Cette fois l’alerte était sérieuse, la maîtresse de maison, hôtesse et cuisinière disparaissait déjà dans la bouche géante du four où grésillaient des merveilles.
Nous avons tous alors déplié nos serviettes.
Grosses et charnues, les Saint-Jacques de la baie de Seine ont ouvert le festin. Il fallut déplacer le chandelier pour déposer l’encombrant plateau de fruits de mer de la côte fleurie. Accaparée, armée et prête à en découdre, la tablée a sombré dans une concentration extrême avant de retrouver voix et exclamations quand l’hôtesse a déposé, savamment découpé le chapon mignoté par la vieille dame du marché local. Le trou normand n’est jamais innocent. Nous avions élargi la trilogie régionale à quelques spécialités moins connues du cru fromager normand et si les pâtisseries maison étouffèrent le reste d’appétit, la salade de fruits aida, comme l’on dit, à faire passer.

Cette veillée imaginaire réveille des souvenirs forcément anciens. Ceux qui, enfouis dans la mémoire, surgissent quand une belle table est dressée. Bien sûr, nombreux étaient les foyers qui ne proposaient autant de merveilles et la plupart des repas de fête étaient beaucoup plus modestes. De mémoire défilent boudin blanc local, galantine et pâtés en croûte de fabrication artisanale, gigots de nos pâturages, dinde, oie ou coq au vin d’une ferme voisine, d’une ferme connue par un familier, on dessalait les haricots et les laitues étaient d’hiver, les desserts étaient ceux dont on se transmettait les recettes de mère en fille, crème, œufs, beurre ne provenaient pas du supermarché, oranges et mandarines étaient rares et chères, une gourmandise d’autant apprécié.

Amis, rien ne vous interpelle dans ces mets princiers ou humbles ? Vraiment ?
Mais si, bien sûr ! La provenance locale ou régionale des produits cités. Nos agapes ne nécessitaient ni camions frigorifiques, ni avion et nul bateau au retour d’un port lointain. Notre région est formidable, productrice en diable et nous sommes devenus bien mal élevés, nous qui rêvons de fraises à Noël ou de cerises pour la Saint Sylvestre.
Alors voilà, je vous propose en guise de vœux pour la nouvelle année une résolution ferme, enthousiaste, inédite à l’heure des hyper et du drive, privilégier autant que faire se peut les produits locaux et régionaux. On se tape dans la main en tenant le pari ?
Bande de veinards, en prime vous allez sillonner nos belles routes de Normandie et pratiquer de l’exercice dans votre futur potager !
Ah, je vous envie moi dont l’épouse tient fermement en main le manche du râteau dans le jardin potager.
Une excellente année à vous tous, sympathisants et amis. Et grâce au site, à l’équipe de Terre Normande, nous pourrons échanger, dialoguer tout au long de l’année.
Chic alors !

Serge Dupont-Valin


Vos réactions à ce billet


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Par Arrondir a Domicile le 24/01/2014 11:38:33 :

Une très bonne lecture, je vous en remercie !!!


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